Résultats des SIIC au S1 : plus aucune typologie n’est épargnée par la baisse de valeur des actifs
Induite par la hausse des taux et accentuée par le faible volume de transactions, la variation des valorisations du parc atteint -14 % au premier semestre, parfois compensé par un effet « loyers » favorable dans les zones les plus centrales.
Indicateur le plus scruté lors de la présentation des résultats des foncières cotées, l’ANR l’est encore plus en temps de crise du marché. Ce premier semestre fait d’autant moins exception à la règle que l’actif net réévalué, résultat de la valeur du parc moins les dettes, est en baisse chez toutes les sociétés d’investissement immobilier cotées (SIIC) exposées au bureau. La pression sur les taux de capitalisation a fini par faire varier les valeurs des actifs tertiaires au 30 juin dernier. L’effet « taux » comme le marché l’appelle, cette conséquence macro-économique négative attribuable à une hausse des taux de capitalisation, a ainsi impacté négativement la valeur des actifs sur l’ensemble des classes d’actifs autour de -14 % en moyenne. Tour d’horizon pour les majors du bureau, les pure players du commerce et les SIIC dédiées à l’alternatif.
Inéa fait cavalier seul à +3,3 %
Chez toutes les foncières cotées exposées au marché du bureau, la valeur du parc baisse. Il est néanmoins une exception : Inéa. Au premier semestre, le spécialiste du green building neuf en région a enregistré une variation de juste valeur de son parc de 7 M€ – soit +3,3 % sur six mois, à 1,264 Md€ DI. « La création de valeur liée à la commercialisation des vefa et à l’indexation des loyers ont permis de compenser largement le relèvement des taux de capitalisation », explique Philippe Rosio, son P-dg. Il s’établit ainsi à 5,89 %, contre 5,78 % six mois plus tôt. Compte tenu du contexte de marché, la création de valeur enregistrée au premier semestre 2023 est néanmoins inférieure à celle constatée douze mois plus tôt (-67 %), ce qui explique le recul du résultat net consolidé de 42 % », nuance-t-il dans la foulée.
De -3,4 à -6,7 % pour le peloton
La première SIIC à donner la mesure de la baisse chez les majors du bureau est Gecina. Son patrimoine majoritairement composé de bureaux prime dans le QCA ne l’a pas immunisée contre un repli des valeurs, même si partiellement compensé par des effets loyers positifs dans les zones centrales (+5 % dans Paris intra-muros et +3 % dans le core du Croissant Ouest). « Le patrimoine bloc ressort à 18,5 Md€ avec une variation de valeur à périmètre constant de -4 % sur six mois et de près de -7 % sur douze mois », annonce Beñat Ortega, directeur général de Gecina. Même constat chez SFL, grandement exposé au prime parisien. « L’évaluation au 30 juin 2023 du patrimoine à dire d’expert est en baisse de -3,4 % à périmètre constant par rapport à l’évaluation du 31 décembre 2022, indique Dimitri Boulte, son directeur général. La variation de valeur des immeubles de placement dégage une perte de 327,8 M€ au premier semestre, contre un produit de 205,4 M€ au premier semestre 2022. La décompression des taux de capitalisation (35 bips en moyenne) et taux d’actualisation (40 bips en moyenne) est en partie compensée par les effets visibles de l’indexation des loyers et de la progression des valeurs locatives dans Paris sur les meilleurs actifs », nuance-t-il. Chez STE, dirigé par Christel Zordan, la valeur du patrimoine à périmètre constant s’affiche en baisse de -3,2 % à 1,83 Md€ (et de -6,7 % depuis début 2022). Chez Vitura, Jérôme Anselme, son dirigeant, met en avant le travail d’asset management pour expliquer la limitation de la baisse de valeur des actifs de la foncière cotée, qui s’affiche à -4,6 % (1,44 Md€, vs 1,5 Md€ six mois plus tôt. Pour Covivio, le repli est plus accentué, avec une baisse de -5,5 % à périmètre constant (-7,8 % sur un an). « Dans le même temps, la forte croissance de nos revenus de +7,6 % à périmètre constant nous permet de relever notre perspective de résultat net récurrent 2023 », tempère Christophe Kullmann, son directeur général. Chez Icade, la valeur du portefeuille de la foncière tertiaire est en baisse de -6,7 % à périmètre constant. « Le taux de rendement moyen sur ce portefeuille s’élève à 6,6 % au 30 juin dernier, en hausse de +60 pb, permettant d’offrir une prime de risque attractive par rapport aux taux sans risque, supérieure à 360 pb », souligne Nicolas Joly, nouveau directeur général.
De +0,3 à -3,4 % dans le commerce
Frey et MRM créent encore de la valeur
En cette première moitié de l’année, les foncières cotées pure players du commerce ont tiré leur épingle du jeu par rapport à leurs consœurs du bureau. Profitant d’un repricing plus ancien et déjà acté sur cette typologie d’actifs, le retail décote en moindre mesure au cours du premier semestre – ou bien ne décote pas du tout. Deux SIIC s’offrent en effet le luxe de voir le patrimoine prendre de la valeur à périmètre constant. Frey, tout d’abord qui, avec son modèle de retail parks récents et green, voit son portefeuille gagner +0,3 % de valeur par rapport à fin 2022, à 1,55 Md€. « Les excellentes performances de ce semestre démontrent une nouvelle fois la pertinence du patrimoine unique de Frey, qui allie robustesse de la valeur immobilière et rentabilité récurrente », se réjouit Antoine Frey, son P-dg. MRM, ensuite, dont le patrimoine prend +0,2 % de valeur, à 245,4 M€. La foncière cotée soutenue par Altarea depuis l’an passé explique ainsi que « la hausse des taux de capitalisation retenus par les experts (+20 pdb en moyenne) » reste compensée par « l’effet favorable des commercialisations et de l’indexation ».
Les ténors du retail constatent la perte de valeur
Du côté des autres SIIC, la perte de valeur du patrimoine reste inéluctable à périmètre constant par rapport à fin 2022, notamment chez Mercialys (-3,4 % à 2,8 Md€) et Unibail-Rodamco-Westfield (-2,2 % à 51 Md€). Klépierre affiche pour sa part un patrimoine en baisse de -1,4 % à 19,2 Md€, une diminution justifiée par la hausse des taux d’actualisation (+20 bps) et de sortie (+10 bps), ainsi que par des projections d’indexation et de valeurs locatives en moindre croissance. Galimmo France présente aussi une baisse de -1 % environ à 681,6 M€, Carmila – qui s’est justement offert Galimmo en juillet – de -0,6 % à 6 Md€ et Altarea Commerce de -0,5 % à 5,46 Md€. De son côté, Sélectirente limite la perte de valeur à -0,4 % sur son patrimoine désormais évalué à 592 M€, avec un taux de rendement moyen quasi-stable de 5 % sur son portefeuille. Ce sont les grandes métropoles régionales qui portent positivement la valeur des actifs, alors que les commerces situés à Paris et en région parisienne ne résistent pas à la tendance baissière.
De -0,8 à -8 % dans l’alternatif
La logistique
Du côté des foncières exposées aux actifs alternatifs, le repli des valeurs se fait également ressentir. Ainsi, Argan – pure player de la logistique – accuse un repli de -8 % de la valeur de son patrimoine, à 3,6 Md€ contre 3,9 Md€ six mois plus tôt. « Intégrant l’effet mécanique de la variation de juste valeur du patrimoine pour -332,6 M€, le résultat net part du groupe s’établit, quant à lui, à -267 M€ pour les six premiers mois de 2023 », relate la foncière emmenée par Jean-Claude Le Lan.
L’hôtellerie
Sur le front de l’hôtellerie, Covivio – SIIC dont les établissements hôteliers pèsent 16 % du patrimoine – enregistre des valeurs résilientes vis-à-vis du bureau, à -0,8 % à périmètre constant. En outre, la foncière cotée bénéficie là d’un « rendement initial plus élevé » et de la « poursuite du rebond de l’activité » hôtelière. Dans le détail, les valeurs des actifs à revenus variables baissent de -0,5 %, quand ceux à revenus fixes sont en retrait de -1,1 %.
Le résidentiel
À contrario, Covivio est touchée par une baisse plus significative des valeurs d’expertises sur son patrimoine résidentiel allemand, de l’ordre de -7,3 %. « Les valeurs métriques, basées sur des valorisations en bloc, ressortent très inférieures aux prix moyens de marché au détail », abondent les équipes de Christophe Kullmann. À titre d’exemple, la valeur moyenne du patrimoine s’établit à 3 221 €/m2 à Berlin (vs un prix moyen de marché au détail de 4 900 €/m2). Du côté de Gecina, la perte de valeur du patrimoine résidentiel se fait également ressentir à -2,2 % sur six mois et à -4,5 % sur douze mois (-4,8 % sur le logement traditionnel et -2,3 % sur le résidentiel étudiant).
À noter : Icade – seule SIIC jusqu’à présent exposée à l’immobilier de santé via sa filiale dédiée – a finalisé la cession de la première partie d’Icade Santé auprès de Primonial REIM (1,4 Md€) en juillet dernier.